La peur d’échouer chez les perfectionnistes

La peur d'échouer chez les perfectionnistes

Cet article est la retranscription de l’épisode 2 du Podcast « Parfaitement imparfaits ».

La peur d’échouer. Nous l’avons toutes et tous ressentis un jour ou l’autre.

La peur de l’échec se présente souvent dans des situations où l’on doit sortir de sa zone de confort : donner une prestation en public, passer des examens, mener une présentation ou une réunion, en conférence, changer de travail car il ne nous plait pas, etc.

Qu'est-ce que la peur d'échouer ?

À l’heure, où j’enregistre mon épisode, mon fils vient de partir à l’école, à contrecœur. C’est le dernier jour d‘école avant les vacances de Noël et surtout c’est son spectacle de fin d’année. Cela fait 2 jours qu’il est malade, il a mal au ventre et tousse. Et à son réveil ce matin, il m’a enfin avoué qu’il avait peur, très peur, de faire ce fameux spectacle. Je l’ai pris dans mes bras et lui ai proposé un ancrage. Il a choisi un geste signal facile et discret à répéter : tenir son poing fermé et se reconnecter à un événement passé ou il a ressenti de la fierté après avoir dépassé sa peur. Il s’est remémoré la fois ou l’année dernière il a sauté très haut d’une tour dans un parc pour enfants. Il était tellement fier qu’il a recommencé 3 fois d’affilée. Le jour suivant, il avait coaché un copain plus jeune : ‘’Tu peux le faire, vas-y, c’est normal d’avoir peur. Tout le monde a peur. Je serai avec toi, je te donnerai la main. Aie confiance en toi’’.  

L’exemple de mon fils n’est, en réalité, qu’un prétexte pour vous rappeler que la peur est une émotion en soi. Tout comme personne n’aime échouer, tout le monde a peur. La peur est naturelle et utile pour nous avertir d’un danger potentiel et nous protéger, même si nous ne vivons plus à la Préhistoire et que nous ne sommes plus entourés par des tigres à dents de sabre. Même les super héros des films ont peur, et c’est ok ! Ce qui est moins ok est que la peur nous paralyse au point de nous empêcher de réaliser quelque chose pour lequel nous sommes compétents ou une activité qui nous fait vibrer parce que nous croyons que nous allons échouer. La peur d’échouer réduit nos chances de réussir, elle nous pousse à contrôler tout notre environnement et parfois à procrastiner.

La peur d’échouer est l’une des caractéristiques fondamentales du perfectionnisme. Elle peut se matérialiser par des attitudes d’évitement et de dévalorisation. Nous évitons toute situation qui risque de nous mettre en difficulté ou en danger et nous justifions notre comportement par le fait de ne pas être compétent, d’être un imposteur, d’être nul et nous pouvons nous répéter des phrases du type ‘’je n’ai pas le droit à l’erreur’’, « je rate TOUJOURS tout ce que j’entreprends », « je n’y arriverai JAMAIS », « c’est perdu D’AVANCE ! ».

On retrouve ce même discours intérieur et ce mécanisme d’autosabotage dans le monde du travail ou la pression exercée sur les salariés pour qu’ils atteignent leurs objectifs est très élevée et les entretiens d’évaluation sont redoutés. ‘’Je ne suis pas compétent’’, ‘’je ne vais pas décrocher ce contrat client’’, ‘’je ne recevrai pas ma prime’’, ‘’je vais être rétrogradé, licencié’, ‘’ma carrière est fichue’’’. Nombre de salariés entretiennent ces pensées et sont victimes de crises d’angoisse, de troubles du sommeil, de troubles alimentaires ou de burnout.

Il faut dire que dans notre société actuelle centrée sur la performance, l’échec est stigmatisé. Dès l’école, les enfants comprennent que ceux qui donnent des bonnes réponses sont valorisés et qu’il vaut mieux ne pas se tromper pour ne pas décevoir ou être jugé. Si l’on fait une erreur, c’est que l’on est inférieur aux autres. Ceux qui loupent leur examen, qui créent des entreprises qui ne fonctionnent pas aussi bien que prévu, peuvent être considérés comme des perdants. Échouer est alors synonyme de quelque chose de grave et d’irréversible. En France, à l’école, faire une erreur est souvent interprété comme un manque de travail. Si l’enfant se trompe, c’est qu’il n’était pas assez concentré, qu’il n’a pas assez travaillé ou qu’il manque d’intelligence. Nous n’apprenons pas à l’enfant à raisonner, à s’autocorriger, nous lui apprenons à être sanctionné pour ne pas recommencer.

Dans d’autres cultures, notamment au Japon, le refus de l’échec est tellement fort que l‘échec est souvent synonyme de honte personnelle et familiale, d’humiliation. Or, au plan émotionnel justement, les perfectionnistes font souvent tout pour se prémunir de ces émotions inconfortables, trop difficiles à vivre pour eux.

Alors, je vous invite à observer comment se manifeste chez vous la peur d’échouer, au plan émotionnel et au plan physique. Quand nous sommes perfectionnistes, nous avons tendance à rester ‘’dans notre tête’’, à ne retenir que le négatif, et à nous déconnecter de notre corps, alors que notre corps est un formidable allié et indicateur de ce qui se joue en nous. Si vous revenez à votre corps dans l’instant présent, en pleine conscience, que ressentez-vous quand vous avez peur d’échouer ? Peut-être des blocages au niveau de la nuque, de la gorge, de la respiration, peut-être que vous tremblez ou que vous transpirer… Quelle que soit la manière dont votre peur se manifeste, retenez que, plus vous êtes capable d’aller observer et accueillir ce qui se passe en vous, plus vous pouvez comprendre et amorcer un changement.

On le voit, la peur d’échouer n’est pas un simple petit stress. Pour nous les perfectionnistes, cette peur d’échouer prend la forme d’un véritable interdit. Dans notre vision binaire du tout noir ou tout blanc, de la réussite ou de l’échec, nous faisons rarement de demi-mesure.

Nous avons tendance à considérablement surestimer à la fois le danger et les retombées en termes de résultat. Si nous n’atteignons pas la perfection -qui je le rappelle n’existe pas–, nous avons l’impression que c’est la fin du monde, voire de l’Univers. Nous nous autoflagellons au moindre faux pas. Aucun progrès, aucune réussite n’est suffisante, n’est satisfaisante pour nous. Nous avons beaucoup de difficultés à nous réjouir.

Cela renvoie à notre besoin de reconnaissance, à notre peur de ne pas être ou plus être aimé et à notre manque de confiance en soi, qui sont intimement liés. Nous entretenons un fantasme de perfection et de toute puissance : il nous faut tout réussir tout de suite, sans essai, du premier coup, comme si notre existence sur Terre en dépendait.

Oui, il existe des Succes story ou les protagonistes ont réussi de manière fulgurante mais, la plupart d’entre eux ont surtout beaucoup travaillé, ont osé, ont suivi leur pourquoi, leur vision, se sont détachés du regard des autres et ont essuyé plusieurs échecs avant de savourer leur réussite et de devenir inspirants aux yeux du public ! 100% des personnes qui ont réussi ont essayé et celles qui ont essayé ont pour la plupart échoué plusieurs fois avant de réussir…

Mais d'où vient cette peur d'échouer ?

Le plus souvent, elle puise ses origines dans notre enfance.

D’abord, une éducation trop stricte. Il se peut que nos parents nous aient poussé, consciemment ou non, à mettre la barre très haute, à donner le meilleur de nous-mêmes, à ramener les meilleures notes, à exceller à l’école et dans des activités extrascolaires. Dans certaines familles, les parents vivent par procuration à travers la réussite sociale de leur enfant ou ont besoin que leur enfant réussisse financièrement pour les aider.

Ensuite, il arrive souvent que notre entourage, parents, grands-parents, enseignants, amis, nous comparent avec d’autres enfants, nos frères et sœurs, des cousins, des camarades de classe, lesquels, parfois, réussissent mieux que nous dans tel domaine.

Mais, le fait d’avoir entendu qu’il était un échec et/ou d’avoir échoué à plusieurs reprises peut également parfois créer chez l’enfant un sentiment de répétition et une croyance négative au sujet du fait d’échouer.

En ce qui me concerne, j’ai le souvenir d’un prof de maths au lycée particulièrement rigide et strict qui humiliait les élèves au tableau en nous répétant que nous ne ferions de notre vie et qui exigeait toujours plus de résultats, sans nous aider à mesurer le chemin accompli. Je pense que pendant longtemps, j’ai eu une sorte de loyauté à son égard et faisait tout pour lui donner raison, après tout c’était lui l’enseignant !

À ce stade, il est donc intéressant que vous vous demandiez si votre peur de l’échec est due à des croyances limitantes, à des loyautés ou à vos capacités réelles. Êtes-vous, par exemple, capable de citer spontanément 10 forces qui vous caractérisent et sur lesquelles vous pouvez vous appuyer au quotidien ? Une fois ce travail effectué, réfléchissez à ce que cela signifie vraiment échouer pour vous. Quelle définition donnez-vous au mot échec. Quelles pensées ponts choisissez-vous d’entretenir à la place ? Au besoin, vous pouvez reprendre des expressions comme « échouer m’aide à avancer », « on ne réussit pas toujours du premier coup », « qui ne tente rien n’a rien », ou encore des citations comme celle de Lao Tseu selon laquelle « l’échec est le fondement de la réussite » et celle de Nelson Mandela, “Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends”.

Prenez également de la hauteur, du recul, sur votre impression d’échec – qui n’est soi-dit en passant que la photographie d’une situation à un instant T-. Tirez les leçons de ce que vous considérez comme des échecs, en considérant qu’ils contribuent à votre apprentissage, à votre capacité d’adaptation, à votre construction personnelle et professionnelle, et à votre audace.

Comprenez que l’échec n’est qu’une étape avant votre réussite, qu’il peut vous préparer à mieux réussir, qu’il n’est pas définitif et qu’il n’existe pas de succès sans échec. Vos erreurs ne vous définissent pas, vous n’êtes pas vos erreurs. De même qu’il n’existe pas d’individu programmé pour échouer en permanence, en tout temps. Vous avez forcément déjà réussi des choses, listez-les et reportez-vous y régulièrement.

En France, nous sommes particulièrement marqués par la peur d’échouer et une appréhension à la prise de risque. Aux États-Unis, en revanche, la culture de l’échec est encouragée comme voie d’apprentissage, elle est vue très positivement. D’ailleurs, il n’est pas rare de mentionner fièrement dans son Curriculum Vitae professionnel ses échecs car ceux-ci représentent finalement une expérience inestimable vers la construction de la réussite et du succès. Pour réussir un projet, une tâche, il faut de l’expérience. Et pour gagner en expérience, il faut pratiquer et faire des erreurs. La devise de la Silicon Valley est d’ailleurs « Embrassez l’échec ». En Suède, il existe un musée de l’échec qui expose les plus gros ratages commerciaux afin de rendre positive l’expérience de l’échec. 

Alors, si vous preniez le risque d’échouer, que se passerait-il au pire du pire ?

N’y aurait-il aucune porte de sortie ? Serait-ce vraiment si dramatique ?

Un exercice que j’aime pratiquer pour dédramatiser justement, est celui de ridiculiser ma peur, de la rendre toute petite, de lui donner une forme drôle, de l’affubler d’un gros nœud papillon et d’un nez rouge de clown. Concernant la peur d’échouer, ça été beaucoup plus facile pour moi lorsque j’ai découvert les deux autres noms de la peur d’échouer : atychiphobie et kakorraphiophobie, je n’arrive même pas à les prononcer correctement. Franchement, avec des noms pareils, je trouve la peur d’échouer beaucoup moins impressionnante.

Enfin, rien de mieux pour contrecarrer sa peur, que d’y aller même si nous avons peur ! Mettez-vous en mouvement, en action ! Pour vous y aider, vous pouvez utiliser la règle des 5 secondes, développée par la coach et autrice américaine Mel Robbins. Cette règle permet de remplacer notre tendance à ruminer tous les moindres détails dans notre tête, jusqu’à l’immobilisme, par l’action. Avant d’entreprendre une action que vous trouvez difficile, une action qui vous tétanise et fait réapparaître votre peur d’échouer, entrainez-vous à faire intérieurement le décompte suivant : 5 – 4 – 3 – 2 – 1. Et dès que vous atteignez le chiffre 1, bougez !!

Ce compte à rebours volontairement décroissant vous aidera à vous concentrer sur votre objectif ou votre engagement. La confiance en soi se nourrit par l’action. Plus vous allez essayer, plus vous allez progresser et vous dépasser.

Alors si je résume les 5 points clés de cet épisode, voilà ce que vous pouvez mettre en place face à la peur d’échouer :

  • Accueillir vos émotions et revenir à votre corps

  • Sortir des conditionnements de votre enfance

  • Changer votre rapport à l’erreur

  • Dédramatiser votre peur

  • Vous mettre en mouvement pour passer à l’action.

 

Dans le prochain épisode, je vous parlerai de la peur de réussir, qui peut se cacher derrière la peur d’échouer.

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